"La vie adulte" de Virginie Mouzat aux éditions Albin Michel
Je retourne le livre et je vois:
La mère a disparu comme une image de ce temps-là, début des années 70, quand l'idéal de vie et de réussite était la maison individuelle, la Ford Taunus et le vison.
C'est ce vide que découvre sa fille adolescente, enfermée dans son désarroi, le blanc de la vie adulte devant elle en énigme.
Style minimaliste, rythme sourd, Virginie Mouzat explore ce ballet d'ombres, ce passage du négatif à la couleur quand on sort de l'enfance par l'épreuve de l'absence et du silence.
Et j'en pense quoi?
Dominique aka Nathalie puisque c'est ainsi qu'elle souhaite qu'on l'appelle désormais est une jeune adolescente. Sa mère vient de quitter le domicile familial sans un mot et emportant avec elle la majeure partie de ses affaires. Personne ne semble savoir où elle est et pourquoi elle est partie. Chaque membre de la famille aura alors sa propre réaction face à cette "disparition".
Un père qui ment à ses enfants afin de les préserver mais également car il nie l'évidence et ne veut pas accepter le départ de sa femme. Un père qui tente à tout prix de remplacer la mère, qui se met à cuisiner, qui emmène sa fille faire les magasins et l'accompagne chez ses amis.
Un fils, quasi inexistant dans cette famille, un garçon en pleine adolescence qui préfère passer du temps avec ses amis et ne semble pas vouloir se positionner et jouer un rôle au sein de ce drame familial.
Une jeune fille qui s'interroge sur la disparition de sa mère, elle imagine tous les scénarios, du plus acceptable pour elle (sûrement l'accident) à la fuite volontaire (avec qui? où? pourquoi?). Elle se rappelle la place de la mère au sein de la famille, ses relations avec elle et parallèlement elle se découvre. Après tous les questionnements autour de l'absence, c'est l'envie d'aller de l'avant qui prédomine.
Et enfin, il y a une mère, une mère qui part sans laisser de trace et au delà des interrogations sur le lieu où elle se trouve et ce qu'elle y fait, c'est surtout la place de la mère au sein de notre société qui est mise en avant. Une femme doit-elle être uniquement une mère? Peut-elle privilégier sa vie de femme au détriment de ses enfants? Et dans quelle mesure et quelle proportion peut-elle associer ces deux éléments afin que cela reste acceptable aux yeux de la société?
Il m'aura fallu quelques pages (pas plus heureusement car le roman est très court) pour m'habituer aux phrases très courtes et incisives de Virginie Mouzat. Finalement, le style et le rythme ont réussi à m'emporter dans cette lecture contemporaine qui invite à la réflexion.
